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Les dépossédés, Ursula K. Le Guin : Roman.
Autrice états-unienne du 20è siècle. SF très poétique et sociale. La civilisation humaine vit sur plusieurs planètes. L’histoire prend place sur une planète où vit une société très capitaliste, autour de laquelle gravite un satellite inhabité, qui va être colonisé par des êtres humains membres du mouvement “odoniste”, proche de l’anarchisme. Deux siècles plus tard, cette société fonctionne bien et un des habitants revient sur la planète capitaliste pour témoigner de la réussite du projet. Le livre alterne entre les souvenirs de sa vie sur le satellite et le récit de son voyage chez les capitalistes. Les deux sociétés sont nuancées. Récit très riche, beaucoup d’aspects abordés et développés de façon profonde, que ce soit au niveau politique ou au niveau des relations inter-individuelles. Recommande fortement. Permet de voir l’intérêt de la SF pour projeter d’autres idées du futur.
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Voyage en misarchie : Essai pour tout reconstruire, Emmanuel Dockès : Sorte de confrontation entre un personnage hyper capitaliste qui arrive dans une société anarchiste. Hyper bien.
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Le pavillon des enfants fous, Valérie Valère : Récit autobiographique écrit dans les années 70.
Une jeune fille anorexique est internée à l’hôpital, elle est enfermée, pète des câbles, on lui donne des cachetons, etc. Ils la font manger en lui faisant du chantage (si elle ne mange pas, elle ne sort pas). À la fin, elle sort de l’hôpital en s’alimentant de nouveau, mais sa dépression n’est toujours pas résolue car ils ne s’en sont pas préoccupés. C’est un témoignage sur les hôpitaux psychiatriques dans les années 70.
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Le tampographe Sardon, Vincent Sardon : Catalogue de l’entreprise Le tampographe Sardon, qui a relancé l’industrie du tampon en France fin des années 90/début des années 2000.
Ils proposent des tampons très beaux, très visuels, d’autres rigolo. C’est un catalogue drôle à consulter. Ils ont un compte Instagram également, sur lequel on voit certains de leurs tampons.
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La vallée – La brèche, Tania Maria Elisa : Autrice grenobloise, elle a imprimé ce livre à l’atelier Fluo.
Elle est partie dans une vallée au nord de l’Espagne, a rencontré quelqu’un qui vivait seul là-bas, a vécu avec lui, ils ont été en couple. Elle raconte leur quotidien façon tranche de vie, il y a plein de trous donc plein de trucs qu’on ne suit pas mais c’est comme de la poésie en prose, illustré avec ses photographies prises là-bas. Ses photos sont imprimées en risographie. C’est magnifique, le rendu est très différent d’une impression classique.
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La louve boréale, Nuria Tamarit : Autrice espagnole. Bande dessinée.
La personnage principale éprouve une grande colère et des loups la ressentent aussi. Cette colère semble être due à des hommes. Le récit alterne entre présent (les pages blanches) et le passé (les pages jaunes) sous forme de flashback. On découvre que cette femme vivait sur un continent qu’elle a fuit à cause des guerres. Elle se rend sur un continent où l’on pourrait gagner beaucoup d’argent, selon les rumeurs. Mais c’est une société extrêmement sexiste, elle n’arrive pas à s’y trouver une place car elle est une femme. Elle part donc à l’aventure et rencontre le peuple loup. Les couleurs sont magnifiques, les dessins très beaux. C’est léger, la narration permet de comprendre au fur et à mesure les raisons de sa colère et de sa fuite, elle nous tient en haleine jusqu’au bout. C’est très axé autour de la protection de l’environnement.
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Sirius, Stéphane Servant : Roman ado’, SF. Avril, environ 17 ans, vit dans une cabane dans la forêt avec son petit frère d’environ 6 ans, Kid. Une catastrophe s’est produite il y a longtemps, mais on ne sait pas quoi. Un jour, des gens cherchent Avril, on ne sait pas pourquoi, et elle se retrouve à fuir avec son petit frère. Ils décident de chercher leurs parents, qu’ils devaient rejoindre dans la montagne. Petit à petit, tout au long de leur voyage, on découvre ce qu’il s’est passé et ce qui arrive au monde, qui est en train de mourir.
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C’est l’histoire d’une guerre qui s’étend depuis un millier d’année. C’est l’histoire d’un royaume paisible brutalement frappé par une maladie, un fléau qui se répand. Heureusement, trois piliers du royaume se jettent dans le combat : la chevalerie (pour sauver la noblesse), l’église catholique (pour sauver ses ouailles), la médecine (pour comprendre le mal). Ce récit est celui de leur défaite totale, de leur corruption. Et le titre du livre le racontant, c’est L’invention de la culture hétérosexuelle, de Louis-Georges Tin. Ce livre est découpé en trois parties (chevalerie, église, médecine), à chaque fois l’auteur explique comment chacune a identifié cette culturelle hétérosexuelle comme dangereuse, a lutté contre et a perdu. Le seul défaut de cet ouvrage, c’est qu’il n’explique pas comment l’hétérosexualité a triomphé. Beaucoup de questions apparaissent au fil de la lecture (qu’entend-il par “culture” et pourquoi est-ce un sens si restrictif ?, etc.) et trouvent réponse à la fin. Sa conclusion est très intéressante.
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Pour compléter, 3 lectures stimulantes :
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Le ventre des femmes : Capitalisme, racialisation, féminisme, Françoise Vergès
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Sortir de l’hétérosexualité, Juliet Drouar
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Comment devenir lesbienne en dix étapes, Louise Morel
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Trou noir : Version papier d’une “revue de la dissidence sexuelle” en ligne.
Revue découverte grâce à un article de lundimatin tout à fait piquant. Un article de cette revue commence avec une citation de Renaud Camus, théoricien d’extrême-droite, qui critique l’homophobie, pour ensuite analyser le lien entre extrême-droite et homosexualité, le contexte dans lequel Renaud Camus a prononcé ces mots avec les manifs LGBT à ce moment-là et ce qui se passait dans le Marais dans les années 70. Il y a un article qui critique Réinventer l’amour de Mona Chollet. Revue recommandée aux personnes n’aimant pas les trucs convenus sur la sexualité et aimant le style piquant. Travail d’écriture littéraire. 160 pages, écrit gros, se lit vite.
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Désirer à tout prix, Tal Madesta : Activiste, homme trans, il montre en quoi l’hétérosexualité sert le capitalisme et le patriarcat et à quel point cette injonction à l’hétérosexualité est une puissante créatrice de normes et donc de perpétuation de la société, avec de nombreuses personnes qui ne se retrouvent pas dedans. La seconde partie du bouquin est composée de témoignages de gens qui expliquent comment ils vivent en-dehors de cette norme. On peut reprocher à ce livre le manque d’apport théorique, mais le panel de témoignages est très large et permet de voir de multiples façons de vivre en-dehors de l’hétérosexualité et c’est apaisant.
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Volez ce livre, Abbie Hoffman : Livre datant de 1973, traduit en France en 2015… une fois que tout ce qu’il disait n’était plus révolutionnaire ni actuel. Cet ouvrage donne plein d’astuces de comment vivre avec rien et en marge (comment téléphoner sans payer, voler une voiture, repérer les flics…), un annuaire avec plein d’adresses liées à la contre-culture. L’auteur a écrit ce livre en prison. L’intro, très cool, est disponible en accès libre sur Internet. Il a un point de vue révolutionnaire pendant tout le bouquin. Ce n’est plus très actuel, mais ça montre l’ambiance de l’époque dans ces milieux et Abbie Hoffman est un personnage de l’époque.
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Pour le plaisir de faire la révolution, Jonah Raskin : Excellente biographie d’Abbie Hoffman.
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Le château des étoiles, Alex Alice : Bande dessinée ado’, 6 tomes à l’heure actuelle.
Cette BD de SF (uchronie) est publiée chez Rue de Sèvres, la section bande dessinée de l’éditeur L’école des loisirs. Fin du 19è siècle, la communauté scientifique imagine qu’une matière invisible, l’éther, compose l’espace. La mère du jeune Séraphin, scientifique, disparaît lorsqu’elle tente d’atteindre l’éther à bord d’une montgolfière, sans que personne ne sache si elle a réussit. Son père et lui vont être, des mois plus tard, invités chez le roi de Bavière, qui sous-entend dans son message qu’il a trouvé le journal de bord de la mère de Séraphin… mais les hommes de Bismarck, prince de la Prusse, poursuivent Séraphin et son père, décidés à les empêcher d’atteindre leur destination. Une jolie aventure qui mène notre héros jusque sur la Lune et sur Mars. Le scénario est un peu facile par moment, mais c’est compensé par les magnifiques dessins à l’aquarelle. Recommande surtout pour les ados’.
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Tu ne mourras pas, Bénédicte Heim : Roman.
Corentin, 9 ans, se tape ses baby-sitters.
Le contexte est intéressant : nous vivons dans une société libérale qui nous dit que la liberté est un concept individuel et que nous sommes seuls. Corentin dit à sa baby-sitter, dont la vie est terne, qu’elle n’est pas seule, car il n’est pas encore formé à penser la solitude, il est trop jeune. Cette déclaration va la bouleverser. Et le fait de questionner cette solitude, cette liberté, c’est hyper intéressant. Le problème, c’est qu’au fur et à mesure, et surtout à la fin, ce qui est pointé du doigt c’est que la société est intolérante à leur amour, et c’est la justification de la pédocriminalité présente dans le livre.
Bref, la question sur la solitude est hyper intéressante et la réponse pédocriminelle est nulle.
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La trilogie du rempart sud T.01 : Annihilation, Jeff Vandermeer : SF, trilogie.
Zone Y, il se passe des choses étranges, le gouvernement envoie des expéditions pour comprendre ces phénomènes mais elles reviennent rarement. On suit une expédition, composée de 4 scientifiques (biologiste, linguiste, psychologue, sociologue), comme si on lisait le journal intime de la biologiste. Ils ne rencontrent que des endroits et des espèces qui ne devraient pas exister. Univers captivant, on se perd dans cette histoire, tout est aussi fait pour que l’on soit un peu mal à l’aise mais pas trop, on n’a pas toutes les réponses à nos questions et ça fait foisonner notre inspiration. On n’est jamais certaine que la perception de la biologiste n’est pas altérée. Premier tome excellent, donne très envie de lire la suite. Adapté en film par Netflix, bien mais pas ressemblant, donc lire le livre est une expérience très différente.
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Stalker, Arkadi Strougatski & Boris Strougatski : Histoire similaire, une Zone interdite dans laquelle plus rien ne fonctionne comme sur Terre (l’hypothèse serait que des extraterrestres auraient pique-niqués puis laissés leurs déchets), des gens, les stalkers, entrent dans la zone pour en ramener des objets étranges qu’ils vendent sur le marché noir. Ambiance très particulière.
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Spill zone, Scott Westerfeld & Alex Puvilland : Bande dessinée ado’, deux tomes actuellement. Sur le même thème d’une zone étrange, une femme prend des photos dans la zone et les revend sur le marché noir.
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Fondation, Isaac Asimov : SF, cycle de 5 tomes. Raconte la création d’une Fondation pour mieux reconstruire le 2è Empire après l’effondrement prévu dans 1000 ans. La série adapte très différemment cette histoire mais c’est bien aussi.
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Le regret d’être mère, Orna Donath : Autrice travaillant à Israël en sociologie.
Elle a fait 23 entretiens de mères ayant des profils variés (jeune, moins jeune, riche, moins riche…), avec 30 ou 40 questions posées, pour essayer de cerner au mieux le ressenti de chacune. Démontre aussi que la maternité est une pure construction sociale.
Livraison de Septembre 2022

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Les notes ci-dessous sont un résumé de ce qui a été dit sur chaque titre, et non une retranscription complète des propos échangés.